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Covid-19 : une lourde charge émotionnelle pour les soignants
le 02/06/2020
Pendant plus de deux mois, médecins, personnels soignants et paramédicaux se sont mobilisés auprès des patients touchés par le Covid-19. Aujourd’hui, les hôpitaux reviennent peu à peu à un fonctionnement normal. Mais qu’en est-il des professionnels ? Comment tourner la page après une période si éprouvante ?
Magali Briane est psychiatre-addictologue à la Clinique Mon Repos (Écully, Auvergne-Rhône-Alpes). Cette structure dédiée à la santé mentale a ouvert début 2020 une filière destinée aux soignants. Pendant la crise Covid-19, elle s’est tenue à l’écoute de plusieurs équipes mobilisées sur le terrain, grâce à la mise en place d’accompagnements spécifiques.
Qu’est-il ressorti de vos échanges réguliers avec les soignants pendant la crise du coronavirus ?
Du positif comme du négatif. D’un côté, nous avons senti une émulation chez ces professionnels de santé ainsi qu’une très forte mobilisation. La solidarité inter-équipes mais également le soutien de l’opinion publique et les applaudissements aux fenêtres les ont nourris et aidés à tenir jusqu’au bout ! Cela a aussi contribué à redonner du sens à leur métier.
De l’autre, certains ont eu de vraies difficultés pendant cette période. Beaucoup ont dû se former dans la précipitation à la réanimation. L’interdiction des visites à l’hôpital, les règles d’asepsie ont pu être perçues comme une forme de déshumanisation de l’accompagnement patient. Enfin, la peur a été très présente : peur d’attraper le virus, de le ramener à la maison… Les lignes d’écoutes ont donc été extrêmement sollicitées, ce qui prouve que cette crise aura été une vraie épreuve pour nos soignants.
Quels troubles ou pathologies risquent d’apparaître quand la situation se sera calmée ?
Quand on est dans le feu de l’action et soumis à des rythmes effrénés, on est comme galvanisé, on n’écoute plus vraiment son corps ni ses émotions. Et quand la pression retombe, on peut être submergé par les sensations (fatigue, angoisse…) qu’on avait mises de côté pendant des semaines. Il est donc probable que nos soignants subissent l’épuisement et la charge émotionnelle provoqués par la crise sanitaire dans un second temps. Certains pourront même souffrir du syndrome de stress post-traumatique : un trouble anxieux sévère qui se manifeste après une expérience traumatisante.
Enfin, on peut craindre une diminution de l’intérêt suscité par la profession au sein de la population, laquelle pourrait être mal vécue.
Comment accompagner les soignants dans ces moments difficiles ?
Il faut insister sur la nécessité de prendre soin de soi. On ne choisit pas le métier de soignant par hasard : on se dirige dans cette voie car on aime prendre soin des autres. Mais il faut aussi s’avoir s’écouter et accepter l’aide extérieure. Il ne faut pas banaliser l’angoisse, la fatigue. Il faut absolument alerter sur les difficultés qu’on rencontre. Se reposer, aider le corps à se relâcher… et parler ! Ce sont vraiment les maîtres-mots pour dépasser ce ressenti.
Pour notre part, nous restons attentifs aux besoins des soignants et poursuivons notre travail d’accompagnement en réseau avec les médecins du travail et médecins généralistes de la région Auvergne-Rhône-Alpes.